Acte II. Petit détour… en Patagonie

Avant de nous rendre sur l’Île de Pâques, nous sommes allés nous perdre en Patagonie chilienne.
Ah ! Punta Arenas… Un nom qui fait rêver et agit comme un aimant sur les aventuriers de tout poil. Dès l’atterrissage (chaotique), un vent violent vient vous rudoyer et vous mettre en garde : ici, les éléments sont rois, et il faut avoir un tempérament d’acier, ou être un peu fou, pour affronter le climat caractériel. C’est une terre extrême, où le ciel décline mille visages dans la même journée. Une tempête se lève sans crier gare, et avec elle le sable du mythique détroit de Magellan. En quelques minutes, le soleil laisse place à une pluie diluvienne. Nous avons été baptisés par le souffle colérique d’Éole dès le premier jour. Ici, on raconte même que les chats volent, tant le vent s’engouffre en furie dans les rues taillées à la serpe. D’ailleurs le spectacle des touristes en proie au “venturi” qui les fait chanceler est une véritable attraction pour les Magellanais. Et dire que ce patchwork rieur de baraques colorées aux toits de tôle ondulée n’était, à l’origine, qu’une colonie pénitentiaire…
À subir le vent qui ne faiblit jamais on comprend mieux pourquoi, au sortir de ce détroit implacable, l’océan rencontré par l’expédition de Magellan fut baptisé, par contraste, Pacifique. Ces latitudes répondent encore aux noms évocateurs qu’elles ont reçus des marins au fil des naufrages : quarantièmes rugissants et cinquantièmes hurlants.

Punta Arenas et le détroit de Magellan, au fond.


C’est une terre d’explorateurs et de doux-dingues, de chercheurs d’or et de bandits reconvertis, de têtes brûlées et d’égarés.

El milodon !

C’est sur ce sol à la végétation rase que Butch Cassidi et Billy the Kid ont troqué l’habit du hors-la-loi contre celui du farmer. C’est ici que l’écrivain Bruce Chatwin est venu chercher le milodon, un animal mi-légendaire, mi-préhistorique, dont on peut visiter la grotte près de Puerto Natalès. C’est dans ces plaines austères semées de fossiles que le jeune Darwin aurait élaboré les prémisses de sa théorie de l’évolution. C’est en Patagonie, encore, que le périgourdin Antoine de Tounens s’est intronisé souverain d’un royaume aussi éphémère que loufoque, qui compte encore des sujets aujourd’hui. C’est dans cette Amérique méridionale, surtout, que furent décimées plusieurs ethnies indiennes, devenues gênantes pour des colons avides de terres où élever des moutons. Un véritable génocide…

À la mode de Patagonie

C’est sur cette terre pétrie par la folie des hommes et des éléments que débarquèrent nos deux bretons, plus rompus au Suroît intermittent qu’au Venturi cinglant. Le bonnet péruvien y est de rigueur, même en plein été austral. La panoplie du voyageur averti comporte aussi des lunettes de soleil et de la crème indice 50. Car, malheureusement, c’est aussi au-dessus de la région de Punta Arenas qu’évolue le trou de la couche d’ozone. Bienvenue dans l’œil du cyclope, dont le faisceau brûle les yeux et la peau des Chiliens.
Mais ceci n’empêche pas les pingouins de Magellan de nicher nombreux dans la pampa. En chemin, nous saluons les ibis des Andes, guanacos, zorros, nandous, condors et flamants roses, qui peuplent la région de Puerto Natales. Point de trace en revanche du discret puma, aussi connu sous le nom de cougar. Il nous faudra nous contenter des cartes postales où trône fièrement le félin.

Un petit zorro

Un guanaco

Des flamencos

Pingouins de Magellan

Cette richesse faunistique trouve son apothéose dans le parc national de Torres del Paine, réserve mondiale de la biosphère. Ce sanctuaire parmi les plus sauvages de la planète abrite de denses forêts primitives, poumons de toute vie. Entre cascades impétueuses, lacs turquoises et sommets enneigés, la vision de cette nature grandiose est à la fois une leçon d’humilité et un bouleversement. Comme l’écho d’une lointaine partition jouée à l’unisson dans ce paysage qui vous submerge. Ressourcement ? Remise à l’heure plutôt. C’est là que les mots de l’écrivain chilien Francisco Coloane prennent tout leur sens, lorsqu’il évoque la “désintégration” de l’homme par la nature…

Puerto Natalès, lové dans les fjords.

Torres del paine, la nature à l'état brut.

Le vent ayant eu raison des bateaux remontant les fjords, ce jour-là, nous avons dû rivaliser d’ingéniosité pour voir les grands glaciers : mini-bus, Zodiac et marche à pied. Il faut dire que le spectacle de ces mers de glace aux reflets bleutés vous fait vite oublier la fatigue. Malheureusement l’euphorie est teintée d’amertume, car les effets du réchauffement climatique laissent des stigmates bien visibles sur les calottes glaciaires qui reculent d’année en année : ici, on mesure en km2 les dégâts causés ailleurs.

Le grand glacier Balmaceda, qui recule chaque année...

Embarquement immédiat !

La classe, non ?

On a marché sur... la cordillère des Andes.

Après la glace, le soleil. Il est temps de troquer les polaires contre une chemise à fleurs. Direction… la Polynésie.

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